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Les cochons et les truies

Tout le monde connaît les cochons, mais peu de gens les connaissent bien.

Saviez-vous qu’ils peuvent être affectueux et joueurs? Que leurs capacités cognitives sont souvent comparées à celles des chiens? Ils sont même capables de reconnaître les visages humains!

Dans une étude de 2015, deux cochons vietnamiens ont montré qu’ils étaient en mesure d’associer des gestes et des mots à des objets et des actions.1 C’est ce que font les chiens lorsqu’on leur dit le mot « balle » et qu’ils comprennent de quoi il s’agit, ou encore lorsqu’ils saisissent des commandes comme « assis » ou « reste ».

Aussi surprenant que cela puisse paraître, les cochons sont capables de jouer à des jeux vidéo. Dans le cadre d’une étude publiée dans le journal Frontiers in Psychology, des scientifiques ont montré à quatre cochons comment manipuler une manette de contrôle liée à un jeu d’arcade pour obtenir des récompenses.2 Durant l’étude, le distributeur de gâteries a cessé de fonctionner. Hamlet, Omelet, Ebony et Ivory ont tout de même poursuivi la partie, encouragés par les chercheurs. D’ailleurs, notons que les performances des cochons étaient significativement plus élevées que les résultats obtenus par hasard, ce qui permet de croire qu’ils comprenaient le lien entre la manette de contrôle et le déplacement du curseur à l’écran.

Les cochons sont également capables de contagion émotionnelle, c’est-à-dire qu’ils peuvent ressentir les émotions des congénères qui les entourent. Il s’agit d’une donnée particulièrement pertinente considérant le fait que ces animaux sont souvent élevés, transportés et abattus en grands groupes.

Le saviez-vous?

Les cochons ont été domestiqués il y a environ 8 000 ans. Leur ancêtre, le sanglier (Sus scrofa), est un animal grégaire et intelligent. Il vit en groupe sur un immense territoire et parcourt des dizaines de kilomètres quotidiennement. Les cochons domestiqués ont conservé plusieurs traits de leur ancêtre sauvage, entre autres sa sociabilité et son intelligence.

Fig. 1 Une famille de sangliers

La vie des cochons élevés pour la consommation au Québec

Au Québec, environ 7,1 millions de cochons et de truies sont élevés chaque année  pour être abattus.3 À ce jour, les cochons et les autres animaux d’élevage sont exclus des principales protections — pourtant de base — de la Loi sur le bien-être et la sécurité de l’animal. Le parcours typique des cochons dans l’industrie porcine québécoise ressemble à ce qui suit.4

Le porcelet est sevré dès l’âge de trois ou quatre semaines. S’il est destiné à l’engraissement, il sera envoyé chez un « finisseur », où il vivra en groupe avec d’autres porcelets de son âge durant 18 semaines, pour ensuite être transporté jusqu’à l’abattoir.4 L’espérance de vie des cochons est d’environ 15 à 20 ans.

Fig. 2 Des porcelets curieux dans une ferme sans fenêtre au Canada
Un porcelet femelle destiné à devenir une truie reproductrice ira quant à elle chez un « naisseur », où elle aura en moyenne 2,5 portées par an dès l’âge d’un an. La truie passera la majeure partie de sa vie dans une cage de gestation ou dans une cage de mise bas, qui sont toutes deux à peine plus grandes que son corps.

Ces cages empêchent la truie d’exprimer ses comportements naturels les plus élémentaires, comme se déplacer, explorer son environnement, rechercher sa nourriture, interagir de manière normale avec ses semblables, construire un nid avant la mise bas, etc. Cette privation engendre beaucoup de frustration et de stress, en plus d’être physiquement dommageable. En effet, les truies confinées dans ce type de cages souffrent davantage de faiblesses des pattes et de boiteries en raison du manque d’activité physique. Les blessures aux épaules et les infections urinaires et vaginales sont également courantes.

Fig. 3 Des truies dans des cages de gestation, Québec
Fig. 4 De jeunes cochons entassés dans un enclos, Canada

Plus les capacités cognitives d’un individu sont élevées, plus grands sont ses besoins en matière de stimulation et d’enrichissement. Les cochons étant des êtres intelligents et curieux, ils peuvent rapidement souffrir d’ennui s’ils n’ont pas l’occasion de découvrir de nouvelles choses dans leur environnement et de fouiller le sol. Malgré des millénaires de domestication, plusieurs comportements naturels du sanglier persistent chez les cochons, et ces derniers demeurent très motivés à les reproduire.5 Les cochons et les truies d’élevage seront donc toujours portés à vouloir chercher leur nourriture, à se rouler dans la boue pour réguler leur température corporelle, à construire un nid, à élever leurs bébés en famille, etc. Le contexte de l’élevage leur permet rarement de pouvoir assouvir ces besoins, et c’est pourquoi ces animaux développeront souvent des comportements d’agression ou encore des stéréotypies, qui sont des gestes répétitifs et sans fonction apparente : morsures des oreilles, des flancs ou de la queue de leurs congénères, mâchouillage des barreaux de cage, mastication dans le vide, etc.

Pratiques courantes de l’industrie

Il existe bien un Code de pratiques pour le soin et la manipulation des porcs6, mais celui-ci n’a pas force de loi au Québec. Par ailleurs, ce code permet plusieurs pratiques incompatibles avec le bien-être animal.

D’abord, les porcelets mâles sont généralement castrés quelques jours après leur naissance. C’est l’éleveur lui-même ou ses employés qui incisent le scrotum des bébés pour ensuite retirer les testicules. Le Code de pratiques permet la castration sans anesthésie sur les porcelets de moins de 10 jours, et la plupart d’entre eux sont effectivement castrés avant cet âge.7 Toutefois, l’Association canadienne des médecins vétérinaires (ACMV) considère qu’il s’agit d’une procédure douloureuse, peu importe l’âge, et encourage le recours à l’analgésie et à l’anesthésie. De plus, l’ACMV stipule qu’il existe des solutions de rechange à la castration chirurgicale des porcelets, telles que l’immunocastration8 et la mise en marché de porcs non castrés, comme c’est le cas en Europe.

L’anesthésie supprime la faculté de ressentir. Elle peut être locale ou générale.
L’analgésie élimine ou atténue la douleur, sans supprimer la faculté de ressentir.

Fig. 5 Des porcelets entassés dans un enclos d’une grande exploitation porcine au Québec

Ensuite, d’autres pratiques courantes sont autorisées par le Code de pratiques, telles que la coupe de la queue, la taille des dents, ainsi que le tatouage, l’entaille ou le perçage de l’oreille à des fins d’identification. Ces interventions sont douloureuses et stressantes pour les animaux qui les subissent.

Notons également que lors de manipulations ou de déplacements, les cochons peuvent être dirigés à l’aide d’aiguillon électrique, et que la mise à mort par choc crânien est une méthode d’« euthanasie » permise par le code pour les porcelets de 9 kg ou moins. Le choc crânien est administré en tenant le porcelet par les pattes et en le frappant ensuite vigoureusement contre le sol ou une autre surface dure, ou encore en donnant un coup rapide et puissant sur le dessus du crâne du porcelet à l’aide d’un objet contondant.

Fig. 6 Des cochons entassés dans l’entrée d’un abattoir, Ontario
Fig. 7 Un porcelet tremblant agonise au sol d’une ferme, Québec
Aucune des pratiques précédemment mentionnées ne serait permise par la loi
si elle s’appliquait à un chien ou à un chat.

Depuis 2014, le Code de pratiques envisage une transition vers le logement en groupe pour les truies. Initialement, l’échéance prévue était 2024, mais l’industrie porcine en a demandé la prolongation jusqu’en 2029. Cette période de transition est beaucoup trop longue pour les truies, qui peuvent être confinées dans des cages de gestation et de mise bas durant la majeure partie de leur vie.

Toutefois, le comité de modification du code n’est pas parvenu à s’entendre sur cette prolongation. Le code de 2014, ainsi que toute échéance qu’il prévoit, est donc toujours la seule version valide du Code de pratiques pour le soin et la manipulation des porcs jusqu’à ce qu’une modification ou une révision complète de celui-ci soit convenue dans le cadre du processus suivi par le Conseil national pour les soins aux animaux d’élevage (CNSAE).

Cependant, selon leurs propres prévisions, il est peu probable que les producteurs respectent l’échéance de 2024. D’ailleurs, le site du Gouvernement du Québec indique  , comme si la prolongation avait été acceptée, que les éleveurs ont jusqu’à 2029 pour se conformer aux exigences du CNSA.3

Si le secteur porcin affirme imposer une pleine adhésion au Code de pratiques à ses producteurs, ce n’est clairement pas le cas ici.

Ailleurs dans le monde

Les lois qui encadrent l’élevage des animaux destinés à la consommation varient beaucoup d’un pays à l’autre. Certains pays ont tout simplement interdit la castration des cochons, comme le Royaume-Uni et l’Irlande.9 En Norvège, elle doit être réalisée sous anesthésie locale et par un vétérinaire. En Suisse et aux Pays-Bas, la castration nécessite une anesthésie générale.10

La coupe de la queue est prohibée dans certains pays (Suisse, Suède, Norvège, Lituanie, Finlande).11

La durée du confinement des truies dans les stalles de gestation est limitée à un maximum de 4 semaines dans l’Union européenne, à 10 jours en Suisse, à 8 jours au Royaume-Uni et à 4 jours aux Pays-Bas. Le confinement dans ce type de cage est interdit en tout temps dans une dizaine d’États américains, dont l’Arizona12, la Californie13, la Floride14 et le Rhode Island.15

Ce que vous pouvez faire pour aider les poulets

Voici quelques suggestions de gestes à poser pour venir en aide aux cochons et aux truies :

Signez pour les protéger. Si ce n’est déjà fait, nous vous encourageons à signer notre manifeste pour un encadrement juridique des conditions de vie des poulets et des autres animaux d’élevage au Québec, appuyé par près d’une quarantaine de personnalités québécoises. Ce manifeste vise à faire modifier les lois afin que ces animaux bénéficient enfin des protections qu’ils méritent.

Informez-vous sur les cochons en écoutant l’épisode Les porcs aiment-ils jouer? de notre balado Au nom des animaux. Ce dernier est également offert sur Google Balados, Spotify et Apple Podcasts. Et faites-le écouter à vos proches!

Un autre moyen d’arriver à faire changer les conditions de vie des animaux comme les cochons est d’écrire à votre député·e.

La façon la plus efficace d’aider les cochons est de réduire ou d’éliminer votre consommation de produits du cochon. Ainsi, vous vous attaquez au problème à la source.  De plus, demandez l’adoption de politiques favorisant une transition alimentaire durable.

Fig. 8 Un cochon rescapé dans un champ de camomille au Farm Sanctuary, Watkins Glen, New York, États-Unis

Ce que fait la SPCA de Montréal pour protéger les cochons et les truies

Nous prenons la parole régulièrement dans les médias pour défendre les animaux, y compris les cochons. Visionnez ce reportage de Radio-Canada au sujet de l’élevage des cochons dans lequel intervient Me Sophie Gaillard, notre directrice de la défense des animaux et des affaires juridiques et gouvernementales. Ce reportage précise notamment que même lorsque les installations ont été améliorées selon les recommandations les plus récentes, elles demeurent nettement insuffisantes pour répondre aux besoins de confort et de stimulation de ces animaux hautement intelligents et sensibles.

La SPCA accueille parfois des cochons abandonnés ou trouvés errants. Elle les soigne et les confie ensuite à des sanctuaires afin qu’ils puissent mener une vie douce et exprimer des comportements normaux pour des cochons.

Crédits photo:

  • Photographie dans la bannière : © Jo-Anne McArthur/We Animals Media
  • Fig. 1 Photographie : © CrizzlDizzl/Pixabay
  • Fig. 2 Photographie : © Jo-Anne McArthur/We Animals Media
  • Fig. 3 Photographie : © Jo-Anne McArthur/We Animals Media
  • Fig. 4 Photographie : © Jo-Anne McArthur/We Animals Media
  • Fig. 5 Photographie : © Jo-Anne McArthur/We Animals Media
  • Fig. 6 Photographie : © Jo-Anne McArthur/We Animals Media
  • Fig. 7 Photographie : © Jo-Anne McArthur/We Animals Media
  • Fig. 8 Photographie : © Jo-Anne McArthur/We Animals Media