FOIRE AUX QUESTIONS

Le Québec autorise l’élevage de deux espèces à des fins de production de fourrure : le vison et le renard.¹

Contrairement aux espèces animales destinées à la consommation, les animaux élevés pour leur fourrure sont essentiellement des animaux sauvages, et ils sont très mal adaptés à la captivité. Étant à peine domestiqués, ils ont une peur innée de l’être humain, auxquels ils ne peuvent pas échapper dans un contexte d’élevage. La sélection des animaux dans les fermes à fourrure est principalement axée sur la qualité de leur pelage et très peu sur la docilité et l’adaptabilité à la captivité².

L’automutilation, l’infanticide, le cannibalisme et les stéréotypies (comportements répétitifs effectués sans but apparent) sont fréquemment observés chez les animaux élevés pour leur fourrure et reflètent leur détresse psychologique^3,4,5,6,7,8. Des observateurs rapportent que certains animaux passent plus du quart de leur temps d’éveil à manifester des comportements anormaux, comme tourner en rond ou faire des allers-retours incessants dans leur cage.

Il n’est pas possible d’élever et de tuer des animaux sauvages pour leur fourrure d’une manière à la fois respectueuse du bien-être animal et rentable. De fait, dans certains pays, comme l’Allemagne, l’entrée en vigueur d’un cadre réglementaire plus strict en matière de bien-être animal, qui exige entre autres de fournir aux renards d’élevage un substrat pour creuser et aux visons un plan d’eau pour se baigner, a mené à la fin de l’industrie, faute de rentabilité économique.

Les renards et les visons – les deux espèces élevées au Québec – sont des animaux curieux et intelligents; ils sont actifs et parcourent de grands territoires à l’état sauvage. Ils ont des besoins comportementaux complexes, propres à leur espèce.

À l’état sauvage, les renards ont accès à des territoires de plusieurs kilomètres carrés et creusent des terriers complexes pour se loger et mettre bas. Sur les fermes d’élevage, ces animaux se retrouvent confinés toute leur vie dans des cages surélevées dont le plancher grillagé mesure environ 1 mètre carré.

Quant aux visons, ce sont des animaux semi-aquatiques, qui passent beaucoup de temps à plonger et à nager, à la recherche de nourriture. Dans les élevages, ils sont confinés dans des cages dont la surface habitable peut être aussi petite que deux feuilles de papier standard, sans accès à de l’eau pour se baigner⁹. Des scientifiques ont d’ailleurs démontré que priver des visons d’eau pour se baigner produit des niveaux de stress comparables à ceux induits par la privation de nourriture¹⁰. D’animaux solitaires à l’état sauvage, ils se retrouvent entassés par centaines ou par milliers dans des cages empilées les unes sur les autres à l’intérieur de hangars.

Ces codes n’ont pas force de loi et leur application n’est donc pas obligatoire au Québec (ni dans la majorité des autres provinces canadiennes). De plus, même s’ils regroupent un ensemble de lignes directrices minimales volontaires touchant le logement, les soins et la manipulation des animaux, leurs exigences ne garantissent pas un niveau de bien-être animal acceptable.

Ils permettent, entre autres, que les visons juvéniles et adultes soient soulevés par la base de la queue afin d’être transportés sur de courtes distances¹¹. Le fait de garder des animaux qui parcourent plusieurs kilomètres par jour à l’état sauvage dans de petites cages grillagées toute leur vie, les privant ainsi de la possibilité d’exprimer leurs comportements naturels les plus élémentaires leur occasionne de la frustration et du stress.

De plus, la méthode d’abattage des renards adultes exigée par le Code de pratiques pour le soin et la manipulation des renards d’élevage est de faire passer un courant électrique entre deux électrodes, l’une placée dans la bouche et l’autre dans le rectum.

Le Code de pratiques pour le soin et la manipulation des visons d’élevage, quant à lui, autorise l’asphyxie au CO₂ comme méthode de mise à mort pour les visons, une façon de faire reconnue comme étant hautement aversive pour cette espèce¹². Ce même code permet la mise à mort par arme à feu de tout renard de moins de 6 mois devant être « euthanasié¹³».

La SPCA de Montréal a soumis des commentaires au CNSAE dans le cadre de la consultation sur les modifications proposées au Code de pratiques pour le soin et la manipulation des visons d’élevage au début de 2021. La participation de la SPCA (en collaboration avec d’autres groupes de protection animale) visait à obtenir une amélioration du niveau de bien-être animal pour les visons, malheureusement, sans grand succès.

L’élevage intensif de visons est un vecteur de propagation du coronavirus (SRAS-CoV-2). De fait, les visons peuvent contracter le coronavirus responsable de la COVID-19 provenant des humains¹⁴, et se le transmettre entre eux¹⁵. Les conditions dans lesquelles sont gardés les visons d’élevage, caractérisées par un grand nombre d’animaux vivant entassés dans un petit espace, favorisent cette transmission.

En plus de pouvoir se contaminer entre eux, les visons peuvent servir d’hôtes intermédiaires à l’agent infectieux de la COVID-19 et transmettre une forme mutée du virus aux travailleurs et travailleuses qui les côtoient¹⁶. Plusieurs cas d’infection de ce type, survenus dans des élevages de visons, ont été rapportés à travers le monde, notamment au Canada¹⁷.

De plus, de nouveaux variants du coronavirus ont été détectés dans ces élevages, ce qui constitue une menace importante à la santé publique et à l’efficacité des vaccins¹⁸.

Le Conseil national pour les soins aux animaux d’élevage (CNSAE) a mené une consultation, de décembre 2020 à février 2021, sur des amendements qu’il proposait au Code de pratiques pour le soin et la manipulation des visons d’élevage. Cette consultation a été tenue après la découverte de cas en Europe où les visons avaient contracté le coronavirus responsable de la COVID-19 provenant des humains¹⁹ et se l’étaient transmis entre eux²⁰, et lors de l’apparition du virus dans des élevages de visons en Colombie-Britannique.

Malgré ce fait, les amendements proposés ne faisaient aucune mention de la COVID-19 ou de nouvelles précautions à prendre afin de diminuer la transmission du virus, et ce, en dépit d’un commentaire à cet effet formulé et soumis par la SPCA de Montréal dans le cadre de la consultation et malgré la menace imminente à la santé publique que posait cette propagation au Canada.

L’écoulement du phosphore contenu dans le fumier de vison peut contribuer à la contamination de bassins d’eau à proximité des élevages.

De plus, l’élevage de visons, tout comme la transformation de leur fourrure, est inefficace sur le plan énergétique, car ces activités nécessitent un grand apport en ressources comme l’eau, les terres, la nourriture et l’énergie. Elles contribuent notamment aux changements climatiques, à l’appauvrissement de la couche d’ozone et à l’acidification des écosystèmes terrestres²¹.

La transmission aux animaux de la faune environnante de maladies et de virus présents dans les élevages constitue une menace bien réelle. Cela peut se produire lorsque des animaux de la faune entre en contact avec un vison ou un renard en captivité malade ou qui s’est échappé, avec leurs excréments ou leur carcasse.

Selon une étude européenne²²  effectuée à ce sujet, l’impact environnemental d’un manteau de vison naturel est de 3 à 10 fois supérieur à celui d’un manteau en fausse fourrure. Une étude semblable²³ a aussi comparé l’impact environnemental de la fourrure d’élevage de vison avec celui d’autres textiles synthétiques, comme le coton et le polyester. Par rapport aux textiles, la fourrure a un impact plus important en ce qui concerne 17 des 18 aspects environnementaux mentionnés, notamment les changements climatiques, l’eutrophisation et les émissions toxiques.

L’industrie de l’élevage d’animaux à fourrure est à bout de souffle dans la province. Il ne reste que trois fermes enregistrées au Québec, une de renards et deux de visons²⁴, alors qu’en 1982 on enregistrait 226 fermes d’élevage en sol québécois.

Même si l’industrie est en voie de s’éteindre au Québec, obtenir une interdiction législative de la pratique demeure très important. Cela mettrait officiellement un terme à la souffrance vécue par les derniers centaines ou milliers de visons et de renards qui sont encore élevés au Québec. Une interdiction de l’élevage d’animaux pour leur fourrure empêcherait aussi l’industrie de rouvrir ses portes un jour.

De plus, une interdiction de l’élevage des animaux pour leur fourrure permettrait au Québec de se positionner comme chef de file en ce qui concerne le bien-être animal au Canada.

Parmi les grandes marques ayant cessé d’employer la fourrure, on trouve notamment : Canada Goose, Versace, Giorgio Armani, Calvin Klein, Vivienne Westwood, Kate Spade, Ralph Lauren, Hugo Boss, Tommy Hilfiger, Michael Kors, Gucci, Dolce & Gabbana, etc.

Puisqu’il ne reste que deux fermes enregistrées de visons et une de renards au Québec, les répercussions économiques d’une interdiction seraient faibles. De plus, selon une enquête de la CBC, des programmes fédéraux et provinciaux d’aide financière (comme celui du MAPAQ²⁵) continuent de soutenir les fermes à fourrure alors que le problème vécu par l’industrie découle du déclin du marché.

Nous sommes en droit de nous demander si des subventions et prêts gouvernementaux ne supportent pas artificiellement une industrie qui vient non seulement à l’encontre des valeurs de la population canadienne et québécoise, mais qui n’est également plus rentable.

On note aussi une diminution de la valeur de la fourrure; par exemple, le prix de vente moyen d’une peau de vison au Québec a diminué de 64 % de 2012 à 2018, pour se situer à 30,89 $²⁶.

L’interdiction de l’élevage des animaux pour leur fourrure dans de plus en plus de juridictions pourrait encourager les pays qui continuent à produire de la fourrure dans des conditions problématiques à suivre l’exemple.

De plus, interdire cette activité peut aussi aider à influencer l’opinion publique et à diminuer la demande pour la fourrure et les importations de celle-ci.

Finalement, puisque 100 % des peaux provenant d’élevages québécois sont exportées, dont à 98 % vers les États-Unis, une interdiction de l’élevage des animaux pour leur fourrure au Québec n’aurait pas d’incidence sur les importations dans la province.

De plus en plus de pays interdisent l’élevage des animaux à fourrure (l’entrée en vigueur de l’interdiction est indiquée entre parenthèses ci-dessous): 

l’Irlande (2022), l’Italie (2022), la France (2021), l’Estonie (2026), la Slovaquie (2025), la Norvège (2025), la Belgique (2023), le Luxembourg (2018), la République tchèque (2019), le Royaume-Uni (2000), l’Autriche (2005), les Pays-Bas (2024), la Croatie (2018), la Slovénie (2016), la Macédoine du Nord (2014), la Serbie (2019) et la Bosnie-Herzégovine (2028, mais la dernière ferme a cessé ses activités en 2020).